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Parachat Vayikra: Coeur brisé. Par Rav S.D. Botschko

Parachat Vayikra: Coeur brisé. Par Rav S.D. Botschko

Sous quelque forme qu’ils se présentent, les animaux offerts en sacrifice sont caractérisés par une constante : ils doivent impérativement être exempts de tout défaut[1]. En effet, il vaut mieux ne rien offrir qu’apporter en sacrifice un animal que l’on ne voudrait pas garder pour soi-même. Ce serait une insulte.

Cette loi est facile à comprendre : le sacrifice représente un effort de l’homme pour se rapprocher du Créateur et la possibilité lui est offerte de manifester son respect pour Dieu et d’exprimer les sentiments d’amour qu’il a pour le Tout-Puissant. La ‘ola, en particulier, témoigne de la soumission de l’homme et la combustion intégrale, sur l’autel, de l’animal qu’il apporte en sacrifice, représente sa capacité à renoncer à tout pour Dieu.

Une exception toutefois. L’oiseau apporté comme ‘ola. La Thora ne mentionne pas qu’il doit être parfait et la halakha retient que même un oiseau qui présente un défaut peut être offert[2].

Dans le sacrifice, la bête n’est pas détruite mais élevée au contraire par la sainteté de sa destination. Ainsi les lois concernant l’abattage des bêtes sont-elles déduites de l’abattage des bêtes destinées à être montées sur l’autel.

Le Temple est l’endroit où l’homme affine son caractère. Et comme Dieu demande à l’homme de la noblesse dans tous ses comportements, c’est à partir des lois sur les sacrifices qu’il apprend comment apprêter une bête pour s’en nourrir.

Dans le même esprit, le sang est recueilli dans un récipient, puis projeté tout autour de l’autel. Ensuite, l’animal est proprement dépecé avant d’être consumé sur l’autel.

Pour l’oiseau, tous les gestes sont empreints de violence : il n’est pas abattu à l’aide d’un couteau bien aiguisé ; on lui coupe la nuque avec les ongles (meliqua) puis on presse le cadavre pour en faire couler le sang sur l’autel[3].

Le rav Samson Raphaël Hirsch explique que le sacrifice d’oiseau représente celui de l’homme qui souffre :

L’oiseau, dans l’Écriture, est comparé à l’homme sans protection, poursuivi et plongé dans le malheur et l’affliction comme un oiseau égaré. Dans plusieurs versets bibliques[4], il représente l’image de la fuite et des déportations. Les versets « comme des oiseaux pris au piège[5] » évoquent une vie placée sous la menace continuelle, le summum du malheur même. Pour qualifier une lamentation, on dit d’ailleurs « se lamenter comme une colombe[6]. »

Dans la ‘ola, l’abattage représente l’esprit de sacrifice, le giclement du sang autour de l’autel, la mise au service de Dieu de toutes ses actions, la combustion du sacrifice, l’agrément par Dieu des efforts de cet homme. C’est d’ailleurs un feu venu du ciel qui consume le sacrifice[7]. L’homme qui souffre ne peut présenter à Dieu son esprit de sacrifice, il est comme déjà sacrifié, sa vie ne semble plus avoir de sens, il ne peut que supplier Dieu d’agréer sa souffrance.

Que peut-on demander à cet homme ? La perfection de ses intentions ? Certes non. Il est habité par des sentiments de révolte qu’il ne peut réprimer. Il n’a même pas la force de prendre en charge son sacrifice, c’est le cohen qui devra obligatoirement procéder à la mise à mort de l’oiseau[8], alors que celui qui amène un animal comme sacrifice peut procéder lui-même à l’abattage, même s’il n’est pas cohen[9]. Cet homme a besoin de soutien et il doit être accepté tel qu’il est, sa souffrance couvrant les imperfections qui sont celles de tous les mortels.

Celui qui apporte une ‘ola doit suivre un long chemin avant de mériter sa rencontre avec Dieu. Il sacrifie d’abord l’animal au nord de l’autel[10], point cardinal qui représente le monde matériel d’où il vient, puis il s’approche de Dieu en faisant gicler le sang autour de l’autel[11] ; c’est alors seulement que l’animal pourra être consumé sur l’autel[12], consacrant ainsi sa rencontre réussie avec Dieu.

L’être que la souffrance rend si humble arrive jusqu’à Dieu par un raccourci saisissant. La meliqua se fait sur l’autel, le sang est pressé sur la partie supérieure de l’autel, témoignant ainsi que Dieu lui-même, en l’agréant, donne un sens à sa peine.

« Le cœur brisé et en peine, Dieu, Tu ne le méprises pas. »[13]

[1] Voir par exemple Lévitique i, 3 et Lévitique xxii, 17-25.

[2] Rachi s/Lévitique i, 14.

[3] Lévitique i, 15.

[4] Proverbes xxvi, 2 et xxvii, 8 ; Isaïe xvi, 2.

[5] Lamentations iii, 53 et Ecclésiaste ix, 12.

[6] Isaïe xxxviii, 14.

[7] Lévitique xviii, 14 et Rachi s/Lévitique i, 8.

[8] Lévitique i, 14.

[9] Rachi s/Lévitique i, 5.

[10] Michna Zéva‘him 1, 4.

[11] Lévitique i, 5.

[12] Ibid., 8.

[13] Psaume li, 19.

Extraits – Source : lphinfo.com
https://lphinfo.com/parachat-vayikra-coeur-brise-par-rav-s-d-botschko/

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