Netanyahou face à la guérilla de son aile droite.
Il n’est pas de semaine, voire de jour, sans que l’aile droite de la coalition ne cherche à marquer sa différence au sein du gouvernement. Ce sont soit des déclarations intempestives, soit des actes, voire des incartades, qui viennent semer la zizanie dans la coalition et cela dès les premiers jours de la constitution du nouveau gouvernement. Netanyahou n’est pas dirigeant à supporter longtemps qu’on remette en cause son autorité mais il n’a pas le choix s’il veut disposer de 64 sièges à la Knesset.
À peine nommé ministre, le 3 janvier 2023, le ministre israélien de la Sécurité intérieure, Itamar Ben Gvir, a voulu marquer son indépendance en se rendant sur l’esplanade des Mosquées, à Jérusalem-Est, contre la mise en garde du premier ministre. Certes il l’a fait le matin tôt, 7 heures, avec le moins de publicité possible, sans être accompagné habituellement d’un nombre important de sympathisants. Peu de journalistes avaient été conviés à cette promenade de quinze minutes. Certes Ben Gvir avait mis les formes mais il avait créé un choc au sein du gouvernement.
Ce fut ensuite la déclaration fracassante de l’ancien général Zvika Fogel qui avait rejoint Otzmah Yehudit. Le député avait appelé à l’arrestation des dirigeants des partis d’opposition. Netanyahou a dû condamner cette «déclaration malheureuse» en précisant que «dans une démocratie, les dirigeants de l’opposition ne sont pas arrêtés. Nous pouvons être en désaccord. Dans une démocratie, nous prenons une décision à la fin s’il n’y a pas d’accord, mais nous devons également délimiter les limites du discours».
Mais Netanyahou lui-même n’est pas à l’abri de maladresse. Le 11 janvier 2023, il avait présenté aux côtés de Bezalel Smotrich le programme économique du gouvernement et en particulier le plan contre la vie chère. Ce jour-là, tous les observateurs politiques avaient été surpris de voir que Nir Barkat, ministre de l’Économie concerné par ces affaires, se trouvait dans la salle parmi les journalistes alors que sa place était sur l’estrade. Il n’a pas été invité à s’exprimer. On sait que les relations avec Netanyahou ne sont pas au beau fixe et que la main du premier ministre a été forcée pour l’inclure dans son gouvernement. Mais il n’est pas question de mettre en lumière un concurrent.
Plus récemment, le 20 janvier les forces israéliennes ont démantelé un avant-poste en Cisjordanie. Tsahal a expulsé un petit groupe de militants juifs d’un avant-poste qu’ils avaient érigé quelques heures plus tôt en Cisjordanie, contre l’avis du gouvernement. Le ministre de la Défense, Yoav Galant, s’est opposé à cette installation et a ordonné son retrait. Netanyahou a affirmé que «le gouvernement soutient la colonisation, mais uniquement lorsqu’elle est effectuée légalement et coordonnée à l’avance avec le Premier ministre et les responsables de la sécurité, ce qui n’a pas été fait dans ce cas».
Gallant a ouvertement défié Smotrich en ordonnant l’évacuation de l’avant-poste illégal Or Haïm. Pour protester contre cette expulsion, les ministres sionistes religieux ont décidé d’être absents du conseil des ministres car pour eux il s’agit de la violation de l’accord de coalition en évacuant un avant-poste sans coordination et contre les ordres de Smotrich à l’administration civile : «Nous n’avons pas l’intention de laisser passer cela et nous envisageons des étapes supplémentaires à l’avenir».
Après quelques semaines d’existence, le gouvernement est traversé par des turbulences internes, qui étaient certes prévisibles, mais pas à cette cadence. Netanyahou a été contraint d’inclure l’extrême-droite dans sa coalition mais il pensait que le contact avec la réalité du pouvoir allait pousser les extrêmes à plus de pragmatisme. Le contraire s’est passé, chacun a voulu imposer ses marques sans chercher le consensus. Face au terribles défis que traverse le pays, il n’est pas sûr que les nationalistes de droite aient tiré la bonne carte. L’épreuve de force avec cinq familles qui ont établi un nouvel avant-poste illégal sur une colline stratégique du nord de la Cisjordanie, n’est pas d’actualité. La décision de Netanyahou de démettre Arie Dehry de ses fonctions ministérielles, à la suite de la disqualification de la Haute Cour, va certainement engendrer des remous dont on ignore l’intensité et que le premier ministre aurait bien voulu éviter.
Source : benillouche.blogspot.com par Par Jacques BENILLOUCHE