L’armée et les émeutes : Une tarte à la crème politique
Lorsque des émeutes éclatent en France, certains responsables (et certains irresponsables) politiques ont tendance à appeler l’armée en renfort, suscitant l’admiration des Français envers cette institution. Cependant, il est important de clarifier les rôles et les limites de l’armée et de la police dans de telles situations. L’idée selon laquelle l’armée est la solution pour faire face aux émeutes et souligne les différences fondamentales entre ces deux forces de maintien de l’ordre.
Une distinction cruciale: La police est formée pour utiliser principalement des techniques de force « non létale » afin de contenir les émeutes sans porter atteinte à la vie des émeutiers. Elle dispose d’un effectif de 250 000 policiers et gendarmes, dont 25 000 sont spécialisés dans le maintien de l’ordre. En revanche, l’armée est formée à l’utilisation de la force létale et intervient dans des missions de maintien de la paix uniquement avec un accord politique, comme cela a été le cas au Kosovo par exemple. Ainsi, pour que l’armée intervienne, il faudrait que la France bascule dans une guerre civile ouverte, avec l’usage d’armes de guerre, ce qui n’est pas le cas actuellement.
La situation des émeutes et le rôle de la police: Nous ne sommes pas en guerre civile, mais confrontés à des émeutes. Dans de telles situations, nous avons des forces de police spécialement entraînées et équipées pour assurer le maintien de l’ordre. Le déploiement de véhicules blindés de la gendarmerie ne signifie pas une militarisation de la situation, mais plutôt une adaptation aux circonstances.
Le rôle de l’armée: L’armée pourrait mobiliser les 3000 soldats de la réserve opérationnelle de l’opération Sentinelle. Cette opération vise à protéger les sites sensibles contre les attaques terroristes et compte actuellement 7000 soldats déployés. Cependant, il est essentiel de souligner que ces soldats sont armés et formés pour des missions spécifiques liées à la lutte contre le terrorisme. Leur engagement ne devrait se faire que dans le but d’alléger la charge de la police, leur permettant ainsi de se concentrer davantage sur la lutte contre les émeutiers.
Il convient de noter que la gendarmerie n’est pas l’armée, mais une force de police à statut militaire placée sous l’autorité du ministère de l’Intérieur. Le chef d’état-major des armées n’a aucune autorité directe sur la gendarmerie. Cette distinction souligne la nature spécifique de la gendarmerie en tant que force de police disposant d’une organisation et d’un statut particuliers.
Dans les situations d’émeutes, il est crucial de comprendre les différences entre l’armée et la police. L’armée n’est pas la réponse appropriée pour faire face à des émeutes qui ne relèvent pas d’une guerre civile. La police dispose des compétences, de l’entraînement et des équipements nécessaires pour assurer le maintien de l’ordre dans de telles circonstances. Si des renforts sont nécessaires, il est préférable de mobiliser les réserves opérationnelles spécialisées plutôt que de recourir à l’armée.
L’appel à l’armée dans le contexte des émeutes peut être perçu comme une démagogie politique, visant à exploiter la confiance que les Français accordent à cette institution. Bien que les émeutes peuvent être troublantes et défier l’autorité de l’État, Il est essentiel de maintenir une distinction claire entre les rôles et les responsabilités de la police et de l’armée, afin de préserver l’équilibre et la confiance dans notre système de maintien de l’ordre et de respecter les principes fondamentaux qui régissent notre société démocratique.
En définitive, la tarte à la crème de l’appel à l’armée dans les émeutes ne doit pas faire illusion. Les solutions efficaces résident dans le renforcement des capacités et des ressources de la police, ainsi que dans un dialogue constructif avec les parties concernées. Il est essentiel de promouvoir un maintien de l’ordre équilibré, respectueux des droits fondamentaux, et de préserver la confiance de la population dans les forces chargées de garantir notre sécurité et notre harmonie sociale.
Un certain nombre d’hommes politique et de journalistes, utilisent ces arguments dans des moments où la population est sous le choc d’évènements traumatisants et a besoin de solutions expéditives. Ces politiciens ne sont pas aux responsabilités et peuvent raconter n’importe quoi sans risque. En effet, ils ne seront jamais en mesure de gouverner, s’ils le sont un jour, ils comprendront vite que leurs propositions sont inapplicables.
Il est cependant triste de constater qu’un certain nombre de pseudos journalistes s’évertuent à diffuser ces informations, pour faire de l’audience au rabais (c’est tout ce qui compte pour eux), insufflant aux lecteurs des idées séduisantes, mais irréalistes. Ces personnes manquent à leur mission d’informer honnêtement.
Déborah Tolédano