Éric Zemmour : Un retour sur les écrans et une réhabilitation controversée
Trois ans après avoir quitté les plateaux de télévision pour se consacrer à sa carrière politique, Éric Zemmour s’apprête à faire son retour sur le petit écran. Celui qui est aujourd’hui président du parti Reconquête travaille à l’adaptation de l’un de ses plus grands succès littéraires, Le Suicide français, publié en 2014 et écoulé à près de 500 000 exemplaires. Ce projet ambitieux prendra la forme d’une mini-série documentaire en quatre épisodes de 52 minutes chacun, qui sera diffusée sur la chaîne Planète+ du groupe Canal d’ici un an.
Le tournage de cette série, produite par Pallas Télévision, est déjà en cours à Paris. Zemmour a été aperçu dans plusieurs lieux symboliques de la capitale, comme le mémorial des enfants du Vél’ d’Hiv et la rue Nicolas-Appert, là où se trouvait la rédaction de Charlie Hebdo avant l’attentat tragique de janvier 2015.
Lors de sa publication, Le Suicide français avait provoqué de vives réactions, particulièrement dans les cercles médiatiques de gauche. Le Monde n’avait pas hésité à qualifier l’ouvrage de « dérive individualiste » d’un polémiste flirtant dangereusement avec l’extrême droite, tout en dénonçant une lecture « complotiste » et une prose empreinte de nostalgie rance. Libération avait, pour sa part, ridiculisé les positions de Zemmour, le décrivant comme un « troll identitaire », accusé d’être homophobe, islamophobe et sexiste.
Christophe Barbier, alors directeur de L’Express, n’avait pas mâché ses mots non plus, attaquant même les lecteurs de Zemmour, qu’il qualifiait de « beaufs », bien qu’il reconnaissait qu’une petite élite intellectuelle le suivait également. Toutefois, dix ans plus tard, on peut se demander si ce ne sont pas ces « beaufs » qui avaient finalement perçu les réalités sociales avant les commentateurs parisiens.
Lors d’une interview sur Soir 3 en 2014, Zemmour expliquait que le succès de son livre résidait dans la capacité à exprimer le mal-être d’une partie de la population française. « Beaucoup de gens ne reconnaissent plus leur pays », affirmait-il alors. Il évoquait une France affaiblie par ce qu’il appelle « les trois D » : déconstruction, dérision et destruction. Pour lui, ces maux sont les symptômes d’une nation empoisonnée par des idéologies qu’il juge néfastes, comme le socialisme, l’immigrationnisme et le néo-féminisme.
Aujourd’hui, force est de constater que certaines des idées de Zemmour, autrefois marginales, sont désormais reprises par une partie importante de la droite française. Ce retour en grâce médiatique, symbolisé par l’adaptation de son livre en série, souligne la réhabilitation progressive d’un homme qui, à tort ou à raison, avait peut-être vu certaines tendances sociales et politiques avant les autres. Le temps et les événements semblent aujourd’hui donner davantage de crédit à ses thèses, rendant son retour à l’écran d’autant plus significatif.
Alors que certains continuent de dénoncer ses prises de position, le phénomène Zemmour montre que les idées, même controversées, peuvent influencer durablement le débat public.
Déborah Tolédano