Cette dispute qui a conduit à l’incendie du Talmud.
Un événement historique tragique de la culture juive, l’incendie du Talmud, a débuté avec une querelle entre deux maisons d’édition à Venise en 1550. Cet incident a conduit à la perte irrémédiable de nombreux manuscrits juifs, et il a fallu des siècles pour que la littérature et la communauté juive religieuse se rétablissent. L’élément déclencheur de cet événement fut une édition spéciale de Mishneh Torah LehHaRambam, dont seulement quelques copies complètes ont survécu jusqu’à aujourd’hui.
Parmi ces rares exemplaires, l’un d’eux est actuellement mis aux enchères par la maison de vente aux enchères Tiferet et fait l’objet d’une intense concurrence. Cette édition spéciale a une histoire complexe liée à l’incendie du Talmud, dont le prix ne cesse d’augmenter à l’approche de la vente aux enchères qui se tiendra le 4 juin.
Au milieu du XVIe siècle, l’imprimerie était une entreprise florissante en Italie, avec de nombreux imprimeurs travaillant sur divers textes religieux et philosophiques. À l’époque, deux imprimeurs, Marco Justinien et Baragadin, qui étaient tous deux chrétiens, étaient en concurrence acharnée à Venise.
Le livre au cœur de leur conflit était le « Mishneh Torah » du Rambam, un texte juif majeur. Chacun des imprimeurs a accusé l’autre d’insérer des mots diffamatoires contre le christianisme dans leurs éditions du Talmud. Pour résoudre ce différend, ils se sont tournés vers le pape Jules III. Le comité spécial établi par le pape a conclu que le Talmud contenait effectivement des incitations contre le christianisme, ce qui a entraîné la destruction et l’incendie de toutes les copies du Talmud et d’autres nombreux livres juifs. Cela a conduit à des autodafés à grande échelle, un acte symbolique d’autorité où des livres étaient publiquement brûlés.
La campagne de destruction a commencé à Venise en 1553, puis s’est rapidement étendue à d’autres villes d’Italie et à ses pays voisins. Outre le Talmud, de nombreux autres livres juifs ont été brûlés, menant à une perte inestimable de littérature juive. Cet événement a eu un impact profond sur la communauté juive, symbolisant un tournant dans l’attitude de l’Église envers les livres juifs et menant à l’établissement de la censure. Il a fallu des siècles pour que la littérature juive et la communauté religieuse se rétablissent de cette perte.
Cette tragédie est aujourd’hui connue sous le nom de « l’incendie du Talmud » et est considérée comme un événement marquant de la guerre entre juifs et chrétiens et une terrible faille de la littérature juive.
L’exemplaire de la Mishneh Torah qui est mis aux enchères révèle une intrigue supplémentaire. Justinien avait non seulement volé les précieuses gloses de Maharam Padova, qui étaient censées être publiées par l’imprimerie rivale de Baragadin, mais il avait aussi ajouté des mots de mépris contre Maharam Padova.
L’exemplaire de la Mishneh Torah mis aux enchères, qui contient ces gloses, est d’une rareté exceptionnelle. Les cinq autres copies conservées à la Bibliothèque nationale et dans la Bibliographie du livre hébreu ne contiennent pas les feuilles rares avec l’index, Simanei Sefer HaMitzvot, et certaines des gloses de Maharam Padova.
L’édition de Venise 1550 de la Mishneh Torah, imprimée par l’imprimeur chrétien Justinien, est un livre historiquement significatif qui symbolise l’esprit et la voie de Rabbeinu Moshe – le Rambam. Malgré les incidents tragiques qui ont marqué son histoire, ses écrits et la Torah continuent d’être étudiés aujourd’hui. La vente aux enchères Meyuchasim aura lieu la semaine prochaine, et pour ceux qui comprennent la signification et la valeur des livres juifs historiques, ce sera l’occasion de posséder un fragment important de l’histoire juive.
Déborah Tolédano